Trouble de santé mentale affecte plus d’un enfant sur dix

Selon la première enquête menée à l’échelle nationale par l’agence Santé publique France, 13% des enfants âgés de 6 à 11 ans auraient au moins un probable trouble de la santé mentale. Avant cela, les informations sur la santé mentale des enfants n’étaient disponibles que sous forme parcellaire ou peu représentative.

On connaissait déjà l’impact marquant de la crise sanitaire sur la santé mentale des jeunes, mais jusqu’à aujourd’hui, les données étaient presque inexistantes en ce qui concerne les plus jeunes. C’est ainsi qu’a été réalisée cette première recherche nationale, qui suggère que 13% des enfants de 6 à 11 ans souffrent d’au moins un probable trouble de santé mentale.

Enquête sur plus de 15 000 enfants

Menée par l’agence Santé publique France, cette étude transversale s’appuie sur des informations récoltées auprès de plus de 15 000 enfants et enseignants dans près de 400 écoles ainsi que de 10 000 parents au terme de l’année scolaire 2021-2022. Jusqu’à récemment, l’état de la santé mentale de nos enfants n’était représenté que par des données parcellaires ou insuffisantes.

Fondée sur les réponses de différents échantillons (parents, enseignants et enfants), l’étude connue sous le nom de « Enabee », relève que 13% des 6-11 ans souffrent « d’au moins un probable trouble de santé mentale », ce qui équivaut au pourcentage observé chez leurs pairs à travers divers pays européens.

« Nous ne sommes pas surpris mais les chiffres sont suffisamment importants pour nous mener à nous questionner sur ce sujet, pour lequel nous ne disposions d’aucune donnée jusqu’à maintenant », déclare à l’AFP Stéphanie Monnier-Besnard, épidémiologiste et cheffe de projet de l’étude Enabee.

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Probable troubles d’anxiété, d’attention, d’hyperactivité…

Pour rentrer dans les détails, l’étude Enabee dévoile que 5,6% des participants présentent un « probable trouble émotionnel », qui correspond à un trouble anxieux (anxiété suite à une séparation, anxiété généralisée, phobies spécifiques) ou une dépression. Près de 6,6% révèlent un « probable trouble de comportement opposant » allant de l’humeur extrêmement irritable au comportemement querelleur ou provocateur. Enfin, 3,2% de ces enfants exhiberaient un probable Trouble de déficit de l’attention/hyperactivité (TDAH).

D’après les informations recueillies, il n’y a aucune différence notoire suivant le niveau acdémique ou l’emplacement de l’école (écoles publiques hors réseaux d’éducation prioritaire (REP) et écoles privées contre écoles publiques REP ou REP+). C’est un « premier pas » qui permettra d’apporter une « lumière nouvelle à ceux qui prennent des décisions publiques, en vue de futures conduites de sensibilisation », Robert Esquirol.

Grâce à sa régularité, cette étude pourra suivre l’évolution des indicateurs, jauger les conséquences d’éventuels événements (infectieux, environnementaux…) et engager des actions préventives.

Une image très pertinente de la situation actuelle

« Cette étude donne « une vision extrèmement opportune de l’actuelle situation », explique l’AFP Pr Richard Delorme, responsable du service de psychiatrie infantile à l’hôpital Robert-Debré (AP-HP). « On a souvent tendance à se dire qu’un enfant de moins de 11 ans ne peut pas être déprimé ou que cela concerne seulement une portion de la population. C’est réellement erroné. », ajoute le praticien.

Il espère que ces statistiques « révélatrices » pourront donner naissance à des politiques de prévention: « un enfant sur dix est sujet à ça, autant mobiliser des ressources. » Mettant tout particulièrement l’accent sur le rôle des parents. Comme les services de santé sont déjà engorgés, ils peuvent constituer une importante première sentinelles en surveillant attentivement des indicateurs, à l’instar du sommeil ou de l’appétit leur progéniture, ce médecin conseillerait.

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Les enfants ressentent l’angoisse de leurs aînés

Malgré l’actualité de la pandemíe à l’époque de l’étude Enabee, il n’était, de ce fait, pas possible de calculer l’éventuel impact sur la santé mentale de cette nouvelle cohorte d’enfants. Une seconde enquête, « complémentaire », que la Drees (Direction statistiques du ministère de la Santé) publie aujourd’hui, signalant, quant à elle, que la souffrance psychologique grandissant petit à petit chez une petite portion d’enfants et d’adolescents se serait intensifiée à cause de cette crise.

Mais, pour Christelle Gras-Le-Guen, pédiatre, participant professionnellement à cette étude, l,explication ne peut pas être aussi simple. « Il est clair, le Covid a joué un rôle sur la santé mentale des enfants. Cependant, on pressentait cela bien avant l’apparition du Covid. On voyait qu’une certaine proportion enfants présentaient à l’urgence des troubles en lien avec la santé mentale. Il n’y a pas qu’une cause, mais plutôt une série de facteurs. Les enfants captent chez leurs aînés l’angoisse face à la réalité économique et sociale, ainsi qu’à l’environnement, qui ne les épargne pas non plus », explique-t-elle.

En fin de compte, cette enquête, qui est l’émanation de l’épidémiologie et conditions de vie liées au Covid-19 (epicov), indique qu’à compter de mars 2020, 12% des garçons et 13% des filles, âgés de 3 à 17 ans aurait consulté pour l’un ou l’autre sujet d’ordre psychologique. Seuls 7% des garçons et 6% des jeunes filles aussi.

Lorsqu’on ajoute à cela les enfants non-consultants dont les parents estimaient qu’ils avaient besoin d’aide pour des troubles psychologiques nécessitant l’intervention d’un praticien, ce chiffre s’élève à 15%, d’après l’étude, soit près d’un enfant sur six.

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